Où sont les prédateurs ?



Publié le 31/01/2024 sur internet
Publié dans le N°671 de la publication papier du Courrier de Rome



À en croire les médias, la plupart des prédateurs sexuels sont des membres du clergé catholique. À les en croire, les enfants se trouvent en plus grand danger quand ils sont pris en charge par une institution catholique que lorsque l’institution n’a pas de lien avec l’Église. À les en croire, une grande proportion de prêtres catholiques sont des criminels. À les en croire, un homme a plus de chance de sombrer dans la pédophilie s’il est prêtre que s’il est laïc. À les en croire, il y a davantage d’abus sexuels sur mineurs dansla religion catholique que dans les autres religions. Est-ce vrai ?
Jacques Laurentie, dans son livre Un autre son de cloche (2019, Téqui), est allé chercher les vrais chiffres. Il découvre que les abuseurs sont très nombreux, et qu’ils ne sont pas toujours là où les journalistes les voient. Au niveau mondial, entre 5% et 8% des personnes de sexe masculin sont pédophiles, soit parce qu’elles sont passées à l’acte, soit parce qu’elles ont de sérieuses tendances. Et si l’on étudie la population masculine en rapport avec des enfants, le chiffre est plus proche des 8% que des 5%. Si l’on regarde maintenant le clergé de l’Église catholique, alors 2% à 3% des prêtres ou des religieux sont touchés. Ce qui permet à l’auteur de conclure que les prêtres sont deux à trois fois moins concernés que la population masculine en général. Certes, lorsque cette abomination est commise par un prêtre, elle est encore plus grave et inadmissible que lorsqu’elle est commise par un laïc, du fait que le prêtre a fait vœu de chasteté et qu’il est tenu, de par sa fonction, à être un modèle.Mais ce n’est pas une raison pour déformer la réalité.
Il faut alors s’interroger : pourquoi, dans l’esprit des gens, les prêtres sont-ils plus dangereux que les laïcs ? Pourquoi l’image du clergé catholique est-elle si négative dans l’opinion publique depuis une quarantaine d’années ? Parce que les journalistes surmédiatisent les affaires de pédophilie lorsqu’il s’agit de l’Église catholique. Les chiffres analysés par l’auteur montrent que, lorsque l’affaire touche le clergé catholique, les médias en parlent en moyenne quatre fois plus que quand l’affaire concerne une institution sans lien avec l’Église. De ce fait, l’image donnée au public est trompeuse. Certes, les journalistes aiment les événements choquants, et il est vrai qu’un abus sexuel commis par un prêtre est plus choquant que le même abus commis par un laïc. Mais cette constatation légitime ne donne pas le droit d’être malhonnête.
Quant aux98% de prêtres catholiques qui n’ont rien à se reprocher en matière d’abus sur mineurs, les journalistes n’en parlent quasiment jamais. Ils ignorent aussi lebien immense réalisé par beaucoup de prêtres auprès des enfants. Cette réalité réjouissante ne les intéresse pas.
En conclusion, il est vrai, hélas, que les hommes d’Égliserestent, comme le commun des mortels, soumis à la servitude du péché et que celui-ci peut pousser tout homme, le prêtre comme les autres, jusqu’au crime. Néanmoins,il est vrai aussi que l’Église catholique est moins touchée par la pédophilie que les autres institutions. Statistiquement, un enfant a plus de risque de se faire abuser s’il est pris en charge par une institution laïque.

Abbé Bernard de Lacoste

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