Publié le 30/12/2024 sur internet
Publié dans le N°681 de la publication papier du Courrier de Rome
- La célébration de la messe dans le cadre du pèlerinage de Chartres pourrait devenir problématique, écrivions-nous. En effet, même dans le meilleur des cas, où les autorités ecclésiastiques ne refuseraient pas aux prêtres prenant part à ce pèlerinage de célébrer selon le Missel de saint Pie V, il reste tout de même que les organisateurs de ce même pèlerinage n’entendent pas qu’y soit célébrée la messe selon le Missel de Paul VI.
Ce refus enferme les catholiques de la mouvance Ecclesia Dei dans un dilemme. Car de deux choses l’une :
- Soit les raisons de ce refus rejoignent celles pour lesquelles la Fraternité Saint Pie X n’accepte pas non plus la célébration du Novus Ordo, raisons qui font de ce refus une attitude de principe. Alors la mouvance Ecclesia Dei verse dans le supposé schisme qu’elle a voulu initialement éviter en refusant de suivre Mgr Lefebvre.
- Soit la dite mouvance entend rester fidèle à ses origines, en se démarquant par principe de l’attitude adoptée par la Fraternité Saint Pie X. Dans ce cas, elle ne peut faire siennes les raisons pour lesquelles la dite Fraternité refuse par principe le nouveau Missel de Paul VI, ce qui la conduit, pour refuser ce nouveau Missel, à découvrir d’autres raisons introuvables, qui se donnent pour l’heure l’alibi d’un improbable « ADN ».
- La même logique d’évitement du supposé schisme devrait conduire à déconsidérer le refus de la même messe de Paul VI, mais tel qu’il est justifié par la Fraternité Saint Pie X. Le moyen utilisé est identique chez tous les détracteurs du combat mené par Mgr Lefebvre : c’est le recours au seul argument extrinsèque d’autorité, tant il est vrai que la critique interne du nouveau rite de la messe, dont le Bref examen critique des cardinaux Ottaviani et Bacci représente la réalisation la plus parfaite, ne laisse que peu d’espoir aux éventuels apologistes du Missel de Paul VI.
- Cet argument d’autorité est en l’espèce celui de l’autorité de la loi de l’Église, qui, dirigée qu’elle est par l’Esprit de Dieu, ne saurait jamais, par principe, établir une discipline dangereuse ou nuisible pour la foi ou pour les mœurs des fidèles.
La référence de prédilection est la proposition condamnée n° 78 dans la Constitution apostolique Auctorem fidei du Pape Pie VI. Celui-ci entend condamner ici ceux qui voudraient se donner la liberté de faire le départ, parmi les lois de l’Église, entre :
« ce qui est nécessaire ou utile pour maintenir les fidèles dans l’esprit, de ce qui est inutile ou plus pesant que ce que supporte la liberté des enfants de la nouvelle alliance, et plus encore de ce qui est dangereux ou nocif parce que conduisant à la superstition ou au matérialisme ».
L’idée précisément condamnée est celle d’après laquelle il serait loisible de soumettre à l’examen :
« la discipline établie ou approuvée par l’Église – comme si l’Église, qui est régie par l’Esprit de Dieu, pouvait établir une discipline non seulement inutile et plus pesante que ne le supporte la liberté chrétienne, mais même dangereuse, nocive, conduisant à la superstition et au matérialisme ».
Pareillement, dans l’Encyclique Mirari vos, le Pape Grégoire XVI déclare :
« ce serait donc un attentat, une dérogation formelle au respect que méritent les lois ecclésiastiques, de blâmer […] la discipline que l’Église a consacrée, qui règle l’administration des choses saintes ».
Enfin, dans l’Encyclique Mediator Dei, le Pape Pie XII rappelle contre ceux qui voudraient s’en tenir intempestivement aux usages liturgiques anciens, que :
« les rites liturgiques plus récents eux aussi, sont dignes d’être honorés et observés, puisqu’ils sont nés sous l’inspiration de l’Esprit Saint, qui assiste l’Église à toutes les époques jusqu’à la consommation des siècles ».
- L’inadéquation de ce type d’argument a été signalée dès le début par Mgr Lefebvre, dans toutes les réponses qu’il opposa au Pape Paul VI. L’erreur condamnée par Pie VI, Grégoire XVI et Pie XII est celle où la conscience individuelle du fidèle entend juger par elle-même les décisions de l’autorité, en imputant à celle-ci une carence que rien ne saurait présumer.
Réaction d’une Église enseignée qui se prend pour une Église enseignante.
[…] (Texte intégralement mis en forme jusqu’au dernier mot)
- Que dire, dès lors, à tous ceux qui veulent rester fermement attachés au Motu proprio fondateur de la mouvance Ecclesia Dei, et qui considèrent pour autant les fidèles de la Fraternité Saint Pie X comme des schismatiques ?
Que leur dire, sinon :
« Soyez rationnels : devenez modernistes ou même, mieux encore : protestants ».